#Vlog 6 : Les élu·e·s locaux sont-ils trop nombreux ?

Il y a en France environ 525 000 élu·e·s locaux. Ces chiffres sont issus de la base de données de l’open data du Ministère de l’Intérieur établie lors des élections de 2014, et sont donc fiables.

Est-ce trop ? C’est effectivement beaucoup, et ramené aux 66 millions de Français, cela représente 0,8% de la population Française.

Avec la réduction du nombre de communes, via la création de communes nouvelles, et la tendance XXL des communautés de communes, ou d’agglomérations, l’Etat s’est « attaqué » à ce nombre, et les annonces diverses du gouvernement depuis 2 ans préfigurent une volonté de la continuité de cette tendance baissière.

Le nombre important d’élu·e·s locaux est-il une bonne ou une mauvaise chose ?

Comme toutes les médailles, il y a 2 faces à la réponse.

Voyons d’abord la face positive.

Disposer d’un vivier… potentiel de presque 1% de la population pour faire vivre la démocratie sur le terrain, c’est une chance… potentielle pour la démocratie de notre pays. Car cela peut permettre un contact direct des citoyens avec les élu·e·s chargés de la gouvernance de leur territoire. Plus un organisme est irrigué, plus il a des chances de rester en bonne santé. En cherchant un peu, nous avons tous un élu à notre portée directe, dans notre entreprise, notre quartier, voire notre famille. Faites-vous-même le test.

D’autre part, le nombre important d’élu·e·s est évidemment lié au nombre de communes. Il y a en France encore environ 35 500 communes, pour 11 275 en Allemagne, 10375 au Royaume Uni, 8117 en Espagne et 8092 en Italie. C’est beaucoup, mais c’est aussi le creuset de tout ce qui fait la diversité de nos territoires et de notre patrimoine Français dont nous sommes plutôt fiers : la richesse de notre plateau de fromages, le nombre de crus de nos régions, la variété de nos paysages, … et j’en passe.

Chaque « petit morceau de la République », recèle des richesses, qui sont liées à sa culture propre et à ses particularités locales. La centralisation des communes, avec la loi Notre a une tendance évidente à niveler les particularités. Et quand on coupe des racines, la cime de l’arbre souffre évidemment. Même si ça ne se voit pas tout de suite, car les arbres souffrent en silence.

Voici donc quelques arguments en faveur de l’intérêt d’un nombre important d’élu·e·s locaux… et de communes.

élu·e·s locaux trop nombreux ?

Et pour le côté pile ?

Comme vous le savez sans doute, pour une commune dont la population dépasse le seuil de 100 habitants et est inférieure à 500, le nombre d’élu·e·s obligatoires est de 11 conseillers. Pour cette strate, il est donc nécessaire de « trouver » de 2 à 11% de la population de la commune afin de composer un conseil municipal au complet.

J’ai dit « trouver », mais dans beaucoup de cas, il faut aller les chercher, car ils ne viennent pas tous spontanément. Et il est parfois difficile de trouver une telle proportion de personnes qui souhaitent s’engager pour 6 ans au service de leur commune. Le problème se pose également parfois pour désigner qui sera le Maire.

D’ailleurs qui imaginerait que dans une commune de 100 000 habitants, on puisse trouver 11 000 personnes volontaires pour devenir élu·e local ? Ça vous fait sans doute sourire de l’imaginer. Et dans les faits pour une commune de 100 000 à 150 000 habitants, ce sont 55 élu·e·s qui sont requis pour composer le conseil municipal, et non quelques milliers. Soit un ratio de 0.06% de l’effectif de la commune pour 100 000 habitants, à comparer avec les 10% de la petite commune de 100 âmes.

Le nombre important imposé à la petite commune amène ainsi à « recruter » des personnes plus ou moins intéressées, et motivées, d’où un absentéisme non négligeable aux réunions, après 1 ou 2 années de fonctionnement.

D’autant plus que la logique des listes s’est imposée à partir de 1000 habitants, avec l’obligation de parité qui vient encore complexifier un recrutement souvent délicat de candidats et de candidates. Certaines déclarations récentes laissent entrevoir une obligation de parité quelle que soit la taille de la commune.

L’enfer est pavé de bonnes intentions…

Je suis pour la féminisation des conseils d’élu·e·s, mais trop de contraintes rendrait caduque la composition d’équipes déjà très difficiles à créer dans les petites communes.

Le nombre d’élu·e·s peut donc paraitre trop important, dans les petites communes, et quand on se rappelle que plus de 31 000 communes ont moins de 2000 habitants, la question du nombre (ou de la proportion du nombre d’élu·e·s) pour les petites communes peut légitimement se poser.

Les traditions ont du bon, mais peuvent évoluer…

Quelles pistes de solutions ?

C’est naturellement au gouvernement de faire des propositions, mais il n’est pas interdit en ces temps de débat national d’y réfléchir.

La réduction du nombre d’élu·e·s peut s’envisager dans les petites communes, en se basant notamment sur le nombre effectif d’élu·e·s qui s’impliquent durablement dans le cadre d’un mandat. J’entends par-là ceux qui participent à des commissions, qui prennent en charge des projets, au-delà de leur stricte participation aux réunions de conseil municipales, qui sont juste des chambres de délibération.

En parallèle, une formation effective des élu·e·s locaux, et pas seulement un droit à la formation, permettrait un accroissement des compétences disponibles au sein des équipes d’élu·e·s. La baisse du nombre serait ainsi compensée par une meilleure efficience des membres, et le niveau de qualité de la vie démocratique des communes serait ainsi préservé.

Quant à la représentativité des citoyens de la commune, par-delà le nombre, ce sont les relais de communication qui permettent effectivement que les élu·e·s puissent prendre en compte leurs besoins. Les outils digitaux pourraient permettre une collaboration effective entre citoyens, élu·e·s et forces vives de la commune, avec un nombre plus restreint d’élus.

Et vous qu’en pensez-vous ?

Je vous invite à commenter, donner votre avis sur ce sujet et proposer vos propres pistes d’action. Viatic travaille à la création d’un espace collaboratif d’aide au pilotage des collectivités pour favoriser la collaboration des élu·e·s, non seulement au sein de la commune, mais au-delà dans l’espace intercommunal.  

Et vous êtes bienvenus dans l’Académie Viatic, l’espace collaboratif des élu·e·s locaux. L’accès est ouvert et offert à tous les élu·e·s et à leurs collaborateurs ; il suffit de vous y inscrire.

Ce numéro de Maires et Pairs arrive à sa fin. Bonne semaine à tous dans vos terroirs de France, quelle que soit la taille de votre commune. A la semaine prochaine. Merci.

4 réactions sur “ #Vlog 6 : Les élu·e·s locaux sont-ils trop nombreux ? ”

  1. MARIEMBERG Jean-François Réponse

    Le sujet du nombre d’élus est un faux problème. Dans les communes, la plupart des élus est bénévole. Seuls le maire et le(s) adjoints sont indemnisés. La réduction de nombre des conseillers municipaux n’aura aucune influence sur la charge publique. Il faut noter que les élus ruraux interviennent bénévolement pour défendre les intérêts collectifs.
    Dès que l’on passe à une strate supérieure (EPCI, département, région, …) le bénévolat disparaît. Contrairement aux idées reçues des énarques et autres parisiens, plus une collectivité est grosse, plus elle coûte cher aux contribuables. Plus le centre de décision est éloigné des citoyens, plus les coûts de fonctionnement sont élevés. Le transfert de compétences eau ou assainissement, la collecte et le traitement des OM gérés en communauté de communes se traduit par des charges beaucoup plus élevées pour les citoyens.

    • Patrick Baillot Auteur ArticleRéponse

      Merci pour votre commentaire pertinent.
      Effectivement, les élus de terrain des petites communes ne « coûtent pas chers » en rapport avec le service apporté au « bien vivre » de leur commune.
      J’ai d’ailleurs bien en mémoire que mes propres « indemnités de maire » étaient de 400 € par mois, pour environ 50% de mon temps consacré à la commune (donc au détriment de mon salaire puisque j’étais travailleur indépendant).
      Le salaire des élus est, comme vous le savez, une fraction de l’indice 1015, en fonction de la strate de population de la commune, et dans ma commune, nous (es adjoints et moi) ne prélevions que 60% de la fraction à laquelle nous pouvions légalement prétendre.
      Et comme vous le rappelez, dans mon conseil municipal de 11 élus, 8 élus ne touchaient aucune rémunération.

      Mais la raison économique n’est pas la seule invoquée par les « pouvoirs du haut de la République » pour envisager une diminution du nombre des élus. Et la question de fond, est celle de l’implication durable des conseillers tout au long d’un mandat. Et de ce côté, il y a des pistes de progrès à développer.

      Quant aux coûts plus élevés des collectivités quand l’éloignement des élus décisionnaires est plus grand, je vous rejoins totalement.
      Mon 1er article consacré aux « élus et l’argent public » va dans ce sens.
      Et mon prochain article, concerne les différences entre « les maires des villes et les maires des champs ». Vous y trouverez sans doute des échos à vos propres réflexions.
      Pour conclure, le nombre des élus est une force, mais il présente aussi des faiblesses. Il faut garder la force, mais rechercher à pallier aux faiblesses.

  2. philippe Bestetti Réponse

    plus de 34 000 communes en France contre 12 000 en Allemagne (80 millions d’habitants) et 8 000 environ pour l’Espagne et l’Italie. La Grande Bretagne en compte encore moins.

    • Patrick Baillot Auteur ArticleRéponse

      Effectivement, notre pays est champion toutes catégories en matière de nombre de communes. Et il l’est également en matière de variétés de fromages, de vins, de paysages, … La diversité des communes a été le creuset de beaucoup d’aspects de notre culture collective… ou commune 😉
      Chaque village a ainsi une part de « mérite » dans la création de notre nation.
      Cela dit, les temps changent, et il est vrai que les entrées de ville se ressemblent de plus en plus, tandis que les petites communes se désertifient. Les élus de proximité seront toujours plus impliqués que des élus lointains qui ne vivent pas au quotidien dans leur commune. Il faudra sans doute revoir le mode de collaboration pour qu’il soit plus efficient, ainsi que le nombre d’élus représentant chaque « cellule de base » de la république. Dans ce domaine aussi, il vaut mieux cultiver la qualité que la quantité. Mais garder des « managers de proximité » de notre République me semble être un principe très sain pour la démocratie, mais aussi pour la santé du pays.

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